Un certificat PEB
plus juste, plus cohérent et plus (éco)logique !

– LE 7 DÉCEMBRE 2022 –

La Belgique doit réduire sa consommation d’énergie. Au-delà de la crise immédiate liée au coût du gaz et de l’électricité, l’urgence est aussi à la décarbonation de l’ensemble de notre économie. Le changement passera nécessairement par un changement d’habitudes. Il nous faut donc accompagner les citoyens pour modérer nos consommations. Il nous faut, aujourd’hui, pousser une vision pragmatique pour faire face à l’urgence, il nous faut être logiques autant qu’écologiques.

  • Publié le 08.12.2022

  • min.

À Bruxelles, pour atteindre les objectifs fixés par le plan Régional Energie Climat nous devons réduire nos émissions de CO2 de 47% d’ici 2030 et arriver à zéro émission en 2050. L’effort à faire est colossal et demandera d’abord une méthode, ainsi que des investissements et travaux considérables. C’est pourquoi, nos députés bruxellois Jonathan de Patoul, Marie Nagy et Joëlle Maison ont compilé ce dossier ainsi que leurs 10 propositions pour améliorer le certificat PEB.

En 2020, le chauffage des bâtiments (résidentiel et tertiaire) totalise à lui seul 55% des émissions directes de gaz à effet de serre. Le bâti résidentiel et tertiaire représentent à Bruxelles respectivement 36 % et 37 % de la consommation d’énergie.

Il s’agit de rénover 90 % des 560.000 logements que compte la Région bruxelloise, soit la plupart des logements construits avant 1970. Avec un objectif de rénovation annuelle de 3 % des logements, cela représente 16.000 rénovations par an. Aujourd’hui, on rénove un peu plus de 1 %.

Le Gouvernement bruxellois a adopté une stratégie de rénovation du bâti appelée « Rénolution » et a dès 2010, suite à l’adoption de la directive européenne en la matière, adopté le Certificat de Performance Énergétique. Au départ, les normes de performance énergétique étaient appliquées aux immeubles neufs et aux grosses rénovations.

Actuellement, 49 % du parc des logements bruxellois dispose d’un certificat PEB.

Depuis l’adoption du Plan Air-Climat-Énergie et de la fixation de nouveaux objectifs à atteindre avec le Plan Rénolution, le Certificat PEB s’impose dès lors – comme mention ou comme obligation – pour indexer son loyer ou pour obtenir un abattement supplémentaire des droits d’enregistrement à l’occasion d’un premier achat. Il se retrouve également comme indicateur de poids dans la grille de loyers. Par ailleurs, dans une série de politiques publiques, le Certificat PEB tend à devenir un outil de plus en plus utilisé et de plus en plus valorisé.

À partir de 2025, il deviendra d’ailleurs obligatoire, dans l’objectif d’arriver à la neutralité carbone en 2050. Les logements devraient, au minimum, obtenir la note C+, à savoir une consommation maximale de 100kwh/m2/an. Cette généralisation va mettre en évidence le fait que la méthodologie qui définit cet outil doit impérativement être adaptée afin de mieux correspondre à la réalité des ménages et du bâti bruxellois.

Le 19 octobre 2022, DéFI a organisé un séminaire de travail qui a pu compter sur les interventions de Messieurs Philippe Mercier, expert PEB chez Test-Achats et Thomas Damiens, agent immobilier, formateur et certificateur PEB.

En conclusion des débats actuels autour de l’obligation de mesurer la performance énergétique des bâtiments, plusieurs préoccupations apparaissent :

Comment les ménages à faible et moyen revenu vont pouvoir financer la rénovation énergétique de leur logement ? De même que les petits propriétaires bailleurs et copropriétés dans lesquelles certains propriétaires disposent de moins de moyens ?

Les coûts estimés sont importants et ne sont amortis qu’à moyen et long terme grâce aux économies de consommation. Des prêts à taux zéro ou à 1 % sont prévus par le Gouvernement (Ecoreno via le Fonds du Logement) ou des primes mais cela suppose que l’on dispose de fonds propres. Pour atteindre les objectifs demandés, des travaux importants peuvent être nécessaires. Un permis d’urbanisme est parfois demandé et quand on connaît les délais et les difficultés administratives pour son obtention, il est évident et fondamental que les administrations communales et Urban (l’administration qui met en œuvre la politique régionale en matière d’urbanisme) doivent drastiquement accélérer les délais de délivrance

Qu’en est-il du patrimoine et l’image même de Bruxelles ?

Dans beaucoup de quartiers, c’est l’alignement et la diversité des façades qui font l’identité et l’âme de la ville et cela risque d’être détruit par l’isolation extérieure des façades qu’imposerait une approche rigide du PEB. De plus, des interventions malencontreuses risquent de générer des maladies du bâti. Effectivement une isolation mal pensée ou une ventilation insuffisante peuvent amener de la condensation et à terme des moisissures pouvant impacter la santé des occupants.

Vouloir imposer la même exigence en matière de certification PEB pour les constructions nouvelles et pour les rénovations – sans prendre en considération suffisamment les qualités et les contraintes du bâti ancien – risque de donner des réponses inadéquates et coûteuses.

La qualification et la disponibilité des corps de métier

C’est un réel problème, la rénovation du bâti demande de la main d’œuvre et des compétences. Dans le cadre de l’alliance emploi-habitat Actiris soutient la formation dans les métiers de la rénovation énergétique. Malgré cet effort, il nous revient que les difficultés pour trouver des entrepreneurs compétents sont réelles. La Région bruxelloise a prévu, avec les partenaires actifs au sein du Centre de référence professionnelle de la construction, un plan avec 2.839 places de formation destinées aux chercheurs d’emploi et aux travailleurs du secteur.

L’encombrement administratif

Avec quelque 500.000 ménages qui devront faire des travaux, se faire conseiller, demander des aides, des primes et des permis d’urbanisme ainsi qu’un certificat PEB, la mécanique risque de rapidement se gripper !

L’impossibilité technique ou économique dans certains cas d’atteindre l’objectif PEB C+

Ce dernier point mérite d’être développé. En effet, les normes PEB sont plus strictes à Bruxelles qu’en Wallonie, en Flandre ou encore en France. Cette situation ne posait pas trop de difficultés lorsqu’il s’agissait essentiellement de l’appliquer à de la construction neuve, mais maintenant que le Certificat PEB se généralise et tend à s’appliquer aux rénovations cela pose question.

Pour illustrer cette différence, voici le tableau présenté lors de notre séminaire du 19 octobre 2022 par Monsieur Thomas Damiens.

Un immeuble consommant 250 Kwh/m2/an aura un certificat E à Bruxelles, alors qu’il atteint déjà un C en Wallonie

De même les hauteurs libres sous plafond dans les espaces mansardés sont de 1m50 en Wallonie et de 2m10 à Bruxelles, ce qui peut entraîner là encore des différences dans l’obtention d’un certificat étant donné qu’ils rentrent dans le calcul de la superficie à considérer, qui constitue un des éléments de calcul de la consommation et de l’efficacité énergétique. Maintenant que le Certificat PEB se généralise, il faut le modifier et viser une harmonisation avec les autres régions. Qui comprendrait que deux appartements identiques, situés à 100 mètres de distance mais l’un à Uccle et l’autre à Linkebeek n’aurait pas le même PEB ? Ces différences ne sont pas justifiées et créent une rigueur incompréhensible à Bruxelles.

  1. Revoir la méthodologie (soyons logiques)
    Revoir la méthodologie de calcul du Certificat PEB pour se rapprocher de ce qui existe dans les deux autres régions : harmonisation des catégories / consommation, des hauteurs sous-plafond, des longueurs des conduites, des attestations de travaux (exemple: des factures d’achat des matériaux doivent pouvoir être utilisées comme preuve de travaux). La méthodologie doit aussi se baser sur des consommations théoriques plus proches des consommations réelles. Une plus grande transparence dans la méthode de calcul est également indispensable.
  2. Un bilan carbone (soyons écologiques)
    Inclure dans cette méthodologie le bilan carbone des travaux de manière à favoriser des rénovations avec un impact plus limité en termes de dégagement de CO2 grâce – entre autres – à un choix de matériaux plus écologiques.
  3. Priorité aux toitures (soyons pragmatiques)
    Se concentrer sur l’isolation prioritaire des toitures (33% des toitures de la Région ne sont pas isolées ) via des primes majorées. En effet l’isolation des toitures est le geste très efficace en matière de réduction de la consommation énergétique d’un immeuble. Ces primes pourraient être instaurées dès 2023. Des incitants plus importants (accès au préfinancement, aux prêts à taux zéro) doivent compléter le dispositif.
  4. Un audit énergétique nécessaire
    Améliorer le système d’information et d’accompagnement des demandeurs par l’obligation – avant travaux et primes – de réaliser un audit énergétique. Renforcer le rôle des architectes et des Conseillers PEB ainsi que de Homegrade (Centre de conseil et d’accompagnement sur le logement en Région de Bruxelles-Capitale).
  5. Accompagner les demandeurs
    Accompagner les demandeurs y compris dans leurs démarches auprès des entrepreneurs. Beaucoup de demandeurs sont réellement en difficulté pour accéder aux primes, décider des travaux à faire, choisir et suivre les entrepreneurs.
  6. Simplifier les demandes de permis
    Faciliter et simplifier les demandes de permis destinées à améliorer les performances énergétiques.
  7. Préfinancer
    Créer un système de tiers-payant pour le financement des rénovations énergétiques. Les entrepreneurs seraient directement payés par les montants des primes (préfinancement) et les propriétaires paieraient à la fin la différence éventuelle. Cette mission incombe au service primes ou au Fonds de Logement. Ce système devrait être généralisé.
  8. Améliorer les compétences du secteur
    Renforcer la formation des entrepreneurs et entrepreneuses, ainsi que de leur personnel dans les métiers de la rénovation énergétique. (EFP, Bruxelles Environnement)
  9. Évaluer l’efficacité
    Faire une évaluation de l’efficacité économique et matérielle des travaux proposés. Déterminer les émissions de CO2 et les économies d’énergie sur une moyenne des immeubles et pas sur chaque immeuble.
  10. N’oublions pas les copropriétés
    Porter une attention particulière aux copropriétés : conseils, modifications réglementaires, accès au financement, en particulier pour le ou les propriétaires ne disposant pas des fonds nécessaires.

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